Le terme "métèque", que les racistes n'utilisent plus qu'en privé ou en manifestation pour le moment, nous vient en fait de la Grèce Antique et désignait les étrangers sans citoyenneté ni droits. Une préférence nationale avant l'heure, qui se doublait d'ailleurs d'un esclavage institutionnalisé. Une insertion par le travail forcé, en quelque sorte, sans droit à la citoyenneté, les assignant ainsi à une simple identité ethnique. Et pourtant, un exemple souvent donné de "démocratie".
Le père gégène, avant que son front ne devienne rassemblement, utilisait le terme, et en faisait parfois une injure qu'il adressait volontiers aux opposants "rouquins" ou "pédés", qu'il croisait au marché, lors de sortie "filmées". Sa dédiabolisée de fille s'en garde bien en public. Elle aimait Moustaki. Mais sa "priorité nationale" vrille pourtant les esprits au point que l'Assemblée nationale commence à en inscrire le principe dans la loi, sous le prétexte qu'une "majorité de français le demande".
Une "loi métèque" vient d'être donc votée très majoritairement à l'Assemblée.
Suscitée au départ par la Macronie, après un an de péripéties politiciennes, elle s'est transformée en loi aux arguments xénophobes, au fil des bords que tirait son défenseur, ministre d'intérieur. "Sans que son président ne godille" disait-il, dans la langue de Marine. Ainsi, c'est une loi finalement issue d'une majorité de la droite du Sénat, inspirée principalement du programme de l'extrême droite, elle même taraudée par l'ultra droite identitaire, qui a été soutenue par les voix de la macronie, et qui a été entérinée.
Et, comme dans la fable africaine, voilà le ministre de l'Intérieur, les LR et le RN qui, comme des gnous se disputant la paternité d'une merde dans la savane, ne voient pas qu'ils vont se faire bouffer par la hyène. Un spectacle animalier pour soirée du 19 décembre. "C'est ma crotte, c'est pas la tienne, c'est pas la leur".
Une loi négociée dans les couloirs d'une commission prétexte paritaire, et bourrée d'articles à la fois contradictoires, de ruptures d'égalité et d'inconstitutionnalité. Cette merde de gnous étudiée de près nous livre d'ailleurs le régime alimentaire de ses promoteurs, et les digestion multiples d'éléments de programme d'extrême droite qu'elle contient. N'en doutons pas, le Conseil Constitutionnel se sentira obligé d'en censurer quelques articles.
Et, justement, parlons aussi de cela. Loi votée, loi immédiatement censurée en partie, voilà de quoi amener de l'eau au moulin de tous ceux qui nous crient "référendum", primauté du droit national sur le droit européen, réforme de la constitution, rupture d'avec les droits humains empêcheurs de tourner en rond. Etait-ce compris dans le "projeeet !", va savoir.
Les extrêmes droites européennes commencent à citer la rance et le "courage" de son gouvernement pour demander eux aussi à "légiférer". L'Europe pourrait se mettre "en marche" à son tour.
Mais, la "loi métèques" ne fait pas que des heureux.
Au sein du gouvernement, certain.es ont tenté de sauter sur le radeau de la méduse, pour quitter ces rivages boueux, puis se sont ravisés, jugeant que leurs valeurs étaient en bourse et que donc... L'un d'entre eux est pourtant parti à la dérive, sous le simple regard médusé des autres. Ainsi va la marine et ses valeurs. De ce côté là donc, on sauve son portefeuille.
Que dire du presque quart de députés soutiens de la Macronie qui, pour un peu, ont voté contre, pour d'autres, se sont "courageusement" abstenus. Ils/elles auraient pour certain.es voté le programme du Rassemblement National, mais sans lui. Pour celles et ceux là, "proches des rançais", on ne peut plus rien. Pour les quelques vraiment convaincus que cette merde de gnou ne leur appartenait pas, il y a encore toutefois un espoir.
Mais, cet espoir sera vite douché par le tumulte des autres figures de la savane qui s'égaillent sur sa gauche. Les zèbres avec les zèbres, les lions avec les lions, les girafes entre elles... Alors, des gnous égarés, pensez donc.
Cette gauche, puisqu'il s'agit d'elle, après une première union d'intérêts électoraux, la NUPES, a finalement opté pour une guerre des chefs, de clans et de bannières. La 6e république attendra. Du coup, contre la "loi métèque", ça devient petits bras, de quoi désespérer la Seine Saint Denis, puisque Billancourt ne parle plus à personne.
Le fait que dans ce qui devient une crise politique autour d'une loi prétexte, il y ait une gauche de prés carrés, façon puzzle ou mosaïque, n'augure rien de bon.
Va-t-elle se ressaisir ? Va-t-elle symboliquement s'unir pour de prochaines échéances électorales, même européennes, pour permettre de construire un sondage politique permettant de ne pas désespérer de cette crise ? J'en doute fort. Trop de chefs à plumes préparent leurs chevaux et écuries pour une course d'égos en 2027, en refusant de voir que le changement, c'est maintenant.
Car cette crise politique, sous ses allures passagères, dresse les contours de ce qui peut être l'arrivée dans ce pays rance, du même brun qui tache l'Europe.
L'antisémitisme fut un poison essentiel dans la situation de l'Europe de la fin des années 1930. Le personnage fantasmé du juif errant pullulant et pourrissant tout, fut le spectacle de marionnettes qui fit lever le bras des foules. Le migrant, le métèque, en est une réplique modernisée, plus en phase avec la mondialisation.
Le climat change.