Ce qui restait d’humanité après la seconde guerre mondiale s’est mêlé avec les “vainqueurs” militaires de l’époque pour juger les criminels de guerre et nommer ce qui devinrent les crimes contre l’humanité et la reconnaissance des génocides.
Le Droit International et le Droit de la guerre s’enrichirent de conventions et de traités internationaux, sur fond pourtant des ruines de Dresde et d’Hiroshima.
Les images d’enfants à casquette, mains levées devant le mufle d’une arme nazie s’entremêlèrent avec celles de drapeaux blancs sortant d’abris devant les “armées de libération” et les scènes de liesse, où on exhibait des “tondues”.
Toutes photographiées en noir et blanc, imagerie d’Histoire, que Capa soit passé par là ou pas.
Les mains levées n’avaient pas protégé des balles, les drapeaux blancs non plus. La mort est sortie des fusils et survenue par leurs porteurs.
Le tableau de Zehra Dogan qui illustre cet article fait référence à un massacre de civils kurdes, fin 2015, sortis chercher les dépouilles de leurs proches, tués et restés dans la rue depuis plusieurs jours. L’armée turque avait ouvert le feu à partir d’un blindé sur le porteur de drapeau, sans gêne, ni avertissement, ni retenue aucune. L’ordre était de détruire et de tuer. Le plus possible.
Ces mêmes ordres sont donnés aujourd’hui au sein de Tsahal, l’armée israélienne. Elle est là pour “éradiquer le mal”. Au plus haut du gouvernement qui s’octroie lui la “lumière”, ordre est donné d’anéantir les forces des ténèbres, drapeaux blancs compris. C’est l’heure de la vengeance, le moment de faire un bond en avant dans la solution finale à un problème qui remonte à 1948 au moins.
Les analogies avec les méthodes de l’armée turque en 2015 et 2016, lors des sièges des villes kurdes, sont nombreuses. Kedistan s’était interrogé alors sur la nature exacte de ces soldats. Forces spéciales imbibées de l’idéologie de Daesh ou conscrit du rang ? Ces forces s’étaient comportées comme des barbares sur les ruines des maisons détruites. A Gaza, les réservistes de Tsahal y dansent et font des selfies qu’ils/elles publient sur les réseaux sociaux. Aucun journalistes n’est là pour voir le reste.
Venge-t-on le gamin à casquette ? Non, l’heure n’est plus à se souvenir de ces victimes là, il y a du sang plus frais à exhiber pour encourager le militaire et réaliser la catharsis d’une population choquée par les tueries du 7 octobre. Ce n’est plus l’humanité qu’on doit défendre, mais un Etat et la pureté religieuse de sa population, érigée en idéologie nationaliste et colonisatrice. Le sang a appelé le sang, “pour la Nation”, excluante toutefois pour les Arabes.
Autrefois les nazis occupaient où détruisaient les maisons et les terres des Juifs d’Allemagne, de Pologne ou d’Europe, aujourd’hui celles et ceux qui se revendiquent sionistes civilisateurs ont les mêmes pratique en Palestine. La religion ne sert qu’à masquer le crime et l’enrober de légitimité bigote, au nom de la “lumière”.
La pratique n’est pas nouvelle et le continent africain en conserve tous les stigmates.
Drapeau blanc.
On apprend qu’à Gaza trois otages israéliens détenus par le Hamas, torse nu, porteurs d’un chiffon analogue, ont été abattus par Tsahal, venue là, paraît-il, pour les “libérer”. Les soldats ont tiré, comme ils tirent et détruisent depuis deux mois, obéissant ou devançant les ordres. Un gamin ou un otage, quelle différence ? C’est le nombre qui compte. Et voilà que toutes les images de corps portant drapeau sur un tas de gravats, traitées ici d’images de propagande du Hamas, ressurgissent. Les 3 otages tués par Tsahal les valident d’un coup comme vraies.
L’armée “la plus morale du monde” peut commettre des “erreurs” non ? Après tout, on le sait de la bouche de nombreux membres du gouvernement, les “otages”, leur mort, sont et seront de la responsabilité du Hamas. De fait, ils/elles n’avaient pas à être là, en pleine conquête, et sous les bombardements… Alors, vrai ou faux ?
Victimes collatérales. Quand on arrive à 30 000, on n’est plus à trois drapeaux blancs près.
D’ailleurs, les chiffons blancs, ça sert à bander les yeux de celles et ceux qu’on rafle et qu’on déshabille, avant de les monter dans des camions en partance pour les lieux d’interrogatoire. Cela fait de “belles images”, là aussi, que Tsahal et le cabinet de guerre israélien s’empressent de commenter comme “l’approche de la victoire finale sur le terrorisme”. Peut importe si certaines renvoient à Babi Yar et sa fosse.
Le gouvernement d’extrême droite israélien s’assoit sur le Droit International et fustige ses Institutions comme l’ONU ou la CPI. Il n’est plus lui, dans le culte de la Shoah et le “plus jamais ça”. Il est dans le culte de ll’Etat et de sa sécurité à tous prix, dans la toute puissance attaquée et injuriée au Moyen-Orient. Et cela correspond parfaitement avec l’avidité de pouvoir de ses dirigeants, dont son principal corrompu. La réaction outragée sera un “droit à se défendre”, crimes de guerre compris.
Je voudrais rendre hommage aux plus de 80 journalistes tués à Gaza, hors des polémiques habituelles sur les titulaires de carte ou les journalistes morts sous les bombes qui, selon certains, n’auraient pas été “ciblés”. Le nombre de victimes devrait appeler à la fin de l’indécence. La mention de l’assassinat d’une personne qui informe, alors que Tsahal interdit leur présence ou les cible, n’est pas de la “propagande”. C’est un crime de guerre, point. Et ce ne sont ni des “poupées” non plus, ni des “victimes collatérales”. Vrai ou faux ?
Combien de tué.es, de blessé.es, personnes humaines au delà des chiffres, combien de vies torturées à jamais, faudra-t-il à une soldatesque ivre de vengeance, pour qu’elle s’arrête de détruire ?
Combien faudra-t-il d’images, d’otages à drapeau blanc tués, pour que les sursauts d’humanité et de solidarité qui s’expriment pourtant massivement dans certaines rues du monde, parviennent à faire comprendre aux politiciens sourds et muets qu’il est temps de faire taire la mort ? Qui osera le premier “ta gueule Bibi” ?
Pour celles et ceux qui ne connaitraient pas une des significations du drapeau blanc, je dois dire qu’il demande un “cessez le feu”. L’Etat d’Israêl n’en veut pas. Ceux qui l’arment non plus. Les otages apprécieront.
Image à la Une : Zehra Doğan, Acrylique sur page de journal,“Newspaper archives”, période clandestine, 2017, Istanbul.