Pire que le coronavirus tu meurs !

coronavirus

Une chronique sur Kedistan, du 18 mars 2020

Au sujet du coronavirus, et en guise d’introduction, je pose là, sur un coin de chronique, quelques phrases en désordre d’une partie de mikado qui risque de durer.

Le coronavirus agit aussi comme révélateur sociétal
On enfonce des portes ouvertes, (et pourtant fermées en période de confinement qui va devenir quasi planétaire), en disant comme à chaque catastrophe humaine : “rien ne sera plus comme avant“.

A l’avance, sans attendre l’inversion d’une courbe, comme le fit en France un Godot président en son temps, on peut prédire que si, au contraire : “tout restera à faire comme avant“. Bien sûr, nombre de réalités vécues durant cette période pourraient pourtant conduire à des prises de consciences, qui elles, deviendraient possibles vecteurs de changement, voire de “révolutions”. Mais l’implosion du capitalisme n’est pas pour demain matin, et encore moins sans humains pour y contribuer.

Face aux “there is no alternative“, idéologie dominante néo-libérale qui ne se contente pas de commenter le développement capitaliste, mais l’organise et le met “en marche” aujourd’hui, pourraient être mises en évidence toutes les contradictions et fragilités structurelles de ce capitalisme financiarisé et mondialisé qui déménage le monde tous les jours. Mais constater contradictions et écroulements ne font pas des révolutions.

Un virus provoque la dégringolade des bourses mondiales et crée des paniques de pénurie, dans un système où la prédation des ressources est reine, en même temps que les surproductions et le gaspillage font système. Un seul iPhone vous manque, et tout est dépeuplé. Et alors ?

A petite échelle, toute catastrophe humanitaire sidère les populations et les projette dans la survie et, quand il s’agit de guerres, dans l’exil. Il en est de même à bas bruit pour toutes les régions du globe qui subissent de plein fouet, en première ligne, les conséquences premières du changement climatique, voire souffrent de leurs causes prédatrices et destructrices d’environnements de vie. La prise de conscience des populations concernées se fait alors ailleurs, peu souvent sur place, et se perd avant même d’être partagée, dans la surabondance d’informations au jour le jour.

Les guerres qui se mènent par proxys interposés au Moyen-Orient et ailleurs, en Afrique, ont plus d’effets sur le renforcement des frontières que sur des prises de conscience mondialisées de leurs causes, déclenchements et continuité. Elles provoquent pourtant des sièges, confinements, cortèges de morts de femmes, d’hommes et d’enfants en nombre, exodes. Le coronavirus à côté est un petit joueur en nombre de victimes. Mais, là aussi, hors une empathie humaniste, le lien entre le système économique capitaliste qui prévaut et ces lourds bilans humains n’est pas la préoccupation du reste de l’humanité. Nous en faisons pourtant de belles analyses géo-politiques…

Les moyens rapides d’information, les réseaux et la circulation des données ont pourtant ces dernières années “mondialisé” une prise de conscience écologique, même si, en Afrique, en Chine ou en Europe la réalité palpable de cette crise climatique se développe de façon largement différente. Le virus écologique se répand et interroge les systèmes humains… Sans toutefois non plus désigner radicalement le capitalisme, on ne le sait que trop.

Bien sûr, inutile de chercher, vous ne trouverez pas l’esquisse d’une esquisse chez Marx ou Bakounine des conséquences d’un virus à couronne sur la bonne marche du capitalisme et ses contradictions, où s’engouffrerait une prise de conscience révolutionnaire…

Mais, pourtant, à l’échelle planétaire, se partagent en panique des évidences, des contradictions…

De cette crise sanitaire sortiront des livres, des romans, des “ma journée sous confinement” ou “le coronavirus et moi” et même sans doute des scénarios de film.

“On est en guerre, nom de Dieu !”.

Et cette “guerre” contre un coronavirus arrive, alors que le sens des biens communs, du collectif, a subi le rouleau compresseur du néo libéralisme jusque dans les moindres recoins de la planète terre. Et ce, sous des formes étatiques à géométrie variable, regroupées sous le vocable “démocratie”. La philosophie télévisuelle ou auteure de livres de grande consommation, celle qui ne fait pas de politique, nous catégorisera l’égoïsme, l’individualisme, les défauts inhérents à l’humain et j’en passe, et conclura en disant : “dans ces conditions, il fallait s’y attendre, c’est humain“, entre deux publicités étrangement décalées.

Ainsi salue-t-on d’un simple “paas bien !” les manifestations d’inconscience, de panique, d’exodes inutiles, ou d’achats compulsifs. Que vient faire la morale là dedans ? N’y a-t-il pas là au contraire la manifestation même que les leçons du libéralisme ont été bien apprises, tant à l’école que dans les zones de chalandise ?

En lui même, le chariot plein est politique.

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