Difficile de savoir, quand tu n'es pas dans le secret des chapelles, pourquoi se tenaient le même jour, en différents endroits de Paris, métinges ou manifs au choix, et dans le désordre, qui en principe se voulaient toutes et tous anti vômi.
Toujours est-il, que de ma lointaine province, j'ai regardé, sans filtre ni pop-corn, comment se déroulait les métinges, à la télé, et sur les réseaux sociaux.
Pour l'un, c'était l'Union populaire, l'Unité populaire, le Rassemblement populaire, le Front populaire. ?!.. Je n'arrive toujours pas à mémoriser ce qui précède l'adjectif sans devoir regarder à chaque fois. Le populaire est tellement en vogue en ce moment qu'il en est populiste. J'ai pas encore vu passer "les forces populaires avec Zemmour", mais ça ne saurait tarder.
Ce ne serait pourtant pas faire injure au mot que de le laisser se reposer un peu non ?
Bref, le populaire n'ayant pas l'air de s'être préoccupé tant que ça du monstre qui se préparait à faire son show à Villepinte, j'ai boudé. C'est comme ça.
Depuis que j'ai entendu parler de "la violence légitime de l'état", à propos de la mort de Rémi Fraisse, le tricolore légitimiste de gauche me rend pisse froid. L'avait qu'à m'inviter à son anniversaire.
Et le jeu médiatique qui consista, en début d'après-midi, à présenter successivement le programme des deux métinges aux "extrêmes", comme deux figures électoralistes imposées, dont on allait comparer les chiffres, a fini de me convaincre de zapper la vedette américaine. Le replay sera sur twitter, je prendrai le temps.
Et pourtant, je dois l'avouer, dans tout ce cirque électoral, il y a là une alternative susceptible d'enthousiasmer, pour laquelle, sur bien des points, je serais disposé à mettre un masque en manif. Mais voilà, la course à la cocarde, j'apprécie moyen. La république, c'est pas moi. Moi je la veux sociale et sans état. Tant qu'à faire, autant demander l'impossible... et ce serait français.
Et là, en rafales, j'ai vu des bleus ratonner à Villepinte, à pied, à moto et en meute. La force légitime de l'état à l'oeuvre, pour protéger le métinge du facho populiste.
Quelque part, toute comparaison mise à part, ça m'a rappelé une soirée de 1971, où à Paris, la maison poulet et le Ciotti de l'intérieur de l'époque, avaient sécurisé un meeting "d'ordre nouveau". Ben oui, ça ne me rajeunit pas. Il y a même des vidéos en noir et blanc de l'INA qui circulent et qui parlent des "gauchisses violents". Antifas n'était pas dans le Robert. N'empêche que c'est là que "l'immigration" a remplacé le racisme ordinaire de la nostalgie de l'Algérie française, et que le père gégène avait trouvé un tremplin. Un demi siècle que le racisme se cultive à partir de "l'immigré musulman", succédant sans l'abandonner en route, à l'antisémitisme de la vieille france éternelle.
La boucle est bouclée, c'est maintenant un croque mort qui usurpe et triture le passé de l'holocauste, se revendiquant "étranger juif assimilé", et qui reprend le drapeau là où ses aînés l'ont laissé, pour une reconquête qui tient à la fois de génocides anciens revendiqués et d'un Franco soutenu par le nazisme. Un djihad chrétien laïc labellisé avec un antisémitisme rentré. Un truc d'historien faussaire.
Et j'ai regardé la mue en direct, tout en pleurant en constatant le peu de manifestant.e.s réuni.e.s contre lui dans les rues de Paris. A peine 50 par associations signataires de l'appel... Quasi moins que les zilets zaunes période orange.
T'avais qu'à y aller ! Oui, mais à presque 72 ans, côté Villepinte, je me serais fait cabosser vite fait.
On dirait que "la violence légitime de l'état" s'est même renforcée depuis 1971, alors qu'à ce moment là, on criait déjà "à bas l'état policier". Va savoir aujourd'hui où nous en sommes.
Bon, en tous cas, j'ai pas vomi en regardant la bête.
Elle est fidèle aux modèles, ni trop modernisée ni trop ringarde. Un nouveau concept 2022. Populiste comme il faut, sachant faire le pas de côté pour parler au populaire, sans effrayer le financeur.
Son entourage est encore pour l'instant ridicule à souhait, mais cela ne saurait durer.
Quelques brindzingues, mâles et femelles, pour reprendre la nomenclature du maître, des égos à faire pâlir un dentiste, un journaliste qui se couchait tard le samedi, une sorte de nuoc mam issu de la manif pour tous, quelques carnets d'adresses, des jeunes atteints de vieillissement précoce, quelques jaunets en gilets, et quelques gilets en zône, bref, un parterre pour le moment entre déco pour la mue et affaires sérieuses à venir. J'ai cru voir passer quelques jeunes banquiers en tenue et un général en retraite. Ceux-là se cachent encore un peu, mais enrichiront bientôt la panoplie du fasciste amateur.
Voilà pour les voisins invités. Je ne m'attarderai pas trop sur le casting pour remplir la salle, promis.
Dans le style racaille identitaire, le public ne manquait pas de représentants, et il y a longtemps que des chaises n'avaient pas vues autant de face de cul posées sur elles. C'est à noter. Au point qu'on discernait mal les passants au milieu des services d'ordre. A la façon de gueuler "france ! rance!", peut être? Dans les métinges du rassemblement national populaire, on crie "on n'est cheu nous". Là, le "chez" était plus Neuilly. Une nuance à peine perceptible, surtout quand on à l'oreille de Beethoven.
Ce qu'on peut affirmer avec certitude, c'est que cette foule déteste les journalistes.
Ils/elles maltraitent tant leur bête... Seulement quelques centaines d'articles, citations, commentaires par semaine, c'est honteux. Pour qui au fait ?
On ne peut pas reprocher vraiment aux gentils membres du service d'ordre, aidé par des spectateurs, d'avoir voulu rappeler à quelques "antiracistes" odieusement infiltrés, que récemment encore, le journal Le Figaro et le ministre de l'éducation nationale pourfendaient, qu'ils n'étaient pas les bienvenus. "Ils sévissent déjà dans nos écoles, ça suffit comme ça". "Hou les antiracistes provocateurs !"
L'école, tiens, parlons-en. "L'excellence, l'ordre et le mérite", il a dit, l'essayiste en mue. Et fini les classes où l'étranger tire le niveau par le bas. Il a même dit qu'elle serait "libre". La boutin s'en est évanouie au premier rang. Une école comme celle qu'il a rêvée, le berbère refoulé assimilé. Et pourtant, a-t-il l'âge d'avoir connu la classe à tableau noir où trônait la carte des colonies ? Je crois que lui et Caroline Fourest partagent le même rêve de se faire caresser la tête par Jules Ferry.
Bon, que dire d'autres, sur le métinge de la bête ?
Non, nous n'en sommes pas aux défilés macabres des années 30. Et d'ailleurs c'était en couleur, bien décoré franchouille branché et tout et tout. Parait que c'est le même traiteur que le Fillon du Trocadéro. J'suis sûr qu'il lui avait refilé des drapeaux récupérés, dans le tas. Pas de bras tendu, des chemises plutôt grand couturier chez les invités. Ne parlons pas de celles du service d'ordre, un peu foncées quand même pour certains. Oui, un métinge bien français, avec un public presque tout blanc, rapide à éponger le sang à la serpillère dans les rangées du fond. Réussi quoi, comme le clamait une journaliste de LCI, alors que le "polémiste en mue progressive" n'avait même pas fini son rot.
Là, forcément, je me suis dit "sac à vomi et fissa". Parce que du coup, c'est côté commentateurs/tatrices que venait l'odeur. Et là, j'ai bien failli gerber dans les cahouettes. Car, la journée s'étirant, et LCI étant postée devant la bête depuis des heures, on arrivait à l'heure de l'apéro.
La fine fleur journalistique, qui venait de se faire traiter de tous les noms durant le métinge, et dont certain.e.s de leurs confrères et consoeurs avaient été molestés et injuriés sur place, entonnait une ode au mué.
Là, ça m'a gâché l'apéro, et j'ai préféré prendre des nouvelles sur les réseaux, des antifas et antiracistes tabassés et interpellés. Je savais que cela ne sortirait pas de la bouche de ces masos en pamoison. J'ai donc évité le pire, celui du debreefing élogieux, langues pendantes. Bolloré leur fout une sacrée trouille, avec ses rachats de média quand même !
Le reste, vous le connaissez.
Maintenant, avec tout ça, j'ai du rater la publication du dernier sondage.
La rance rance a le nez rivé sur son nombril électoral. Je ne pense pas vraiment que ce nombrilisme ait encore atteint tout le monde. Car, fort heureusement, la majorité n'a pas utilisé la prime de rentrée scolaire pour s'acheter un écran plat. Calimero me dit que si. Faut savoir !