En avril, votons sur un fil

Pourquoi avoir choisi un 1er avril pour écrire sur l'élection présidentielle ? Certain.e.s vont peut être trouver cela irrespectueux.

Mais cette campagne politique pour l'élection l'est-elle, respectueuse ?

Je ne reviendrai pas sur les gesticulations d'il y a quelques mois autour des "primaires" ou pas "primaires", et des candidat.e.s idoines, qui sont depuis retourné.e.s à leurs affaires. Pas plus que je ne m'étendrai sur les dé-partages que tout le monde a déjà oublié, sauf les intéressé.e.s. Les validé.e.s par signatures sont maintenant là, et leurs clips de campagne comme leurs professions de (mauvaise) fois vont arriver dans les boîtes aux lettres.

Quatre candidat.es un peu fachos, facho et demi et complètement racistes, sont en lice, et créditées à eux quatre, dans des sondages à plus soif, à plus de 40 %. Celui ou celle qui n'a pas une ou un de leurs soutiens dans son voisinage ne doit certainement pas vivre en ville. Et en campagne, il/elle a toutes les chances d'en avoir plusieurs, avec gilet même, parfois.

Et tous ces gens seraient respectables ?

Invasion, remplacement, remigration, insécurité, racaille... De Chiotti Dupont à la lettre Z, le purin se déverse à gros bouillons depuis quelques mois maintenant, flot à peine troublé par les poutineries en temps de guerre, vite mises de côté, puisqu'à gauche on se les disputaient un peu aussi.

Bref, sans compter le sortant, on peut dire que cette belle france est plus rance que jamais.

Et ça, ce n'est pas un poisson d'avril.

Vous allez me dire que j'enfonce là des portes ouvertes, et que ma copie a la saveur d'une tirade de Roussel, sans les frites.

Oui, parce qu'il y a ça aussi : la promesse des jours heureux. Elle irradie.

Même le Figaro, Le Point et Marianne trouvent le cadet magnifique. Ils ont trouvé l'amuseur de gauche à opposer à l'insoumis grognon qu'ils n'aiment pas, faute de pouvoir faire monter la sauce hollandaise habituelle pour une candidate laïque et républicaine de "gouvernement", qui peine à vélo dans les montées.

Coincé entre tout ça, et sorti d'une demi primaire, le spécialiste en rénovation thermique et en peinture verte de façade, tente de faire croire qu'il pourrait répondre à la crise climatique en demandant aux capitalistes et aux financiers d'en "prendre conscience". En passant, vous saluerez son ami le homard, parait qu'il se retire de la vie politique.

Et, bien sûr, n'oublions pas le sortant, non, pas de la salle, mais de l'Elysée. Paraît qu'il est mal conseillé. Vu le prix que ça coûte, c'est étonnant. Il ambitionne pourtant, et avec lui les premiers de classe qui le financent, de conserver les commandes. Chef de guerre du Covid, de négociant d'armes un temps avec Poutine, il en est devenu le confident. Bon, j'exagère un peu. Les contrats d'armement, c'était son ami Valls et un reste de carnets de commande de Le Drian, sous régime antérieur "laïc et républicain". Et les confidences, en réalité, ils s'en seraient sans doute bien exonéré. Mais le voilà Malbrough malgré lui.

Il défend son bilan, d'autres, dont les amis ont récemment fait piteusement retraite de Russie, puisque ça sentait le gaz, lui reprochent d'avoir cramé la caisse. Une querelle bien de droite, entre bénéficiaires de la rente capitaliste et prétendants à son partage.

A cette querelle entre libéraux, néo libéraux, interventionnistes, sociaux démocrates, s'invitent donc des socialistes nationaux dans l'âme, se fixant comme programme de rétablir l'ordre et le profit, comme avant. Pour cela, puisque la lutte des classes a du flou dans l'aile, ses défenseurs l'ayant largement repeinte en rose, on fera ressurgir la lutte des races, en bons suprémacistes. Cela tombe bien, puisque ce terrain est labouré depuis un demi siècle par la famille Le Pen, de père en nièce.

Mais, et c'est bien là le sujet, ceci n'est pas qu'une histoire de famille.

Et tout comme personne ne croyait à une nouvelle guerre sur le continent européen, personne aujourd'hui ne croit au retour d'un néo fascisme comme choix collectif momentané pour surmonter une crise.

Il est pourtant dans l'équation électorale qui est proposée.

Tous les castors vont tour à tour inviter à "faire barrage", si pour le deuxième tour de ces présidentielles une Marine Le Pen se qualifie largement. Les mêmes castors que celles et ceux occupés aujourd'hui à planter des drapeaux à gauche, en compétition, qui pour un remboursement de frais de campagne électorale, qui pour préparer des alliances improbables ou contre nature pour des législatives "laïques et républicaines", sources elles aussi de financement de partis.

Bref, ça gueule "au Loup !", mais ça fait l'autruche.

Je ne suis pas un fan des élections. J'ai pourtant participé, pas toujours, à ces simulacres de démocratie. Je fus même candidat à des législatives, dans les années 1970, alors que je militais à la Ligue. J'ai fait une campagne municipale, du temps de feu le "front de gauche". Je connais donc la musique électorale.

Et, justement, parce que je la connais, j'ai bien une petite idée pour ce mois d'avril. Je dois même avouer que j'en ai été convaincu par quelqu'un qui, tout comme moi, voit ces moments dits "démocratiques" seulement comme des opportunités de diffuser des idées, sans illusion du résultat.

Mais là, ouvrons les yeux. Il peut y en avoir un de résultat : un pied dans la porte pour les fascistes. Et l'occasion même pour eux d'avoir un haut parleur durant une campagne de 2e tour fin avril. Et tous les castors aux dents longues n'auront plus alors que la solution d'appeler à voter pour le meilleur représentant du capitalisme du moment. Comme la dernière fois. Cette situation devient ubuesque.

Construire le barrage en éliminant la Fhaineuse de la rivière au 1er tour ne serait-il pas mathématiquement une solution ? Même à partir de "sondages", il semble bien qu'aller voter pour que le 3e candidat qui se revendique lui, "de gauche", et qui est juste derrière, permettrait de réaliser l'ouvrage.

En clair, aller voter pour la candidature de Jean Luc Mélenchon au 1er tour, ne vaut-il pas mieux qu'aller poser un bulletin Macron au 2e tour ? Je crois que même un môme comprendrait çà. Oui, c'est de l'enfantillage électoral, et après ?

Mais, bien sûr, le plaisir, le choix, la conviction, tout çà tout çà... Quel plaisir ? Quelles convictions ? Pourquoi d'après vous les abstentionnistes sont-ils si convaincus justement de ne pas se déplacer ?

Parce que, les drapeaux, les marseillaises, la viande locale, le chèque énergie, le nucléaire, ça les gonfle un peu, surtout même quand ils constatent que le populisme en jaune a lui aussi pour part viré au brun et pourrait bien faire déborder l'urne à l'occasion.

Ben voilà, c'est mon poisson d'avril. Je vais aller voter aux élections présidentielles pour le 1er tour, et faire en sorte que le 3e passe devant. C'est un truc aussi con que ces élections elles-mêmes, mais comme j'ai toujours confiance dans la science mathématique, je vais juste conforter un algorithme pour m'éviter des ennuis. Et je vous invite à en faire autant.

Et puis, ce n'est pas faire injure à l'ami Poutou que de dire que le programme de JLM n'est pas le pire, loin de là. Y en a bien qui ont cru en Mitterrand à une époque... J'ai même quitté la LCR, à cause de ceux là. Cela dit, et pour n'épargner personne, je laisserai aussi volontiers Nathalie au vide de sa place rouge.

Mais entre la descendance mitterrandienne de gauche et le néo fascisme, y aura pas photo. Je voterai Mélenchon au 1er tour, pour faire barrage tout de suite.

Cela dit, une décision de vote ne remplace pas ce combat quotidien contre la bête immonde,  et celui là ne consiste pas seulement à aller lui piquer des voix sur son terrain, ça c'est le populisme.

Alors, poisson d'avril ?

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