« A cette heure là, ils dorment »

racisme

Plein cadre, en direct, sur une chaîne d'info, la candidate du Rassemblement National en Corrèze face à François Hollande "s'exprime". Un jeune journaliste l'interroge, avec pour arrière fond un grand marché qu'on peut supposer être celui de Tulle. Voilà pour le décor.

Précisons que la "candidate", n'est pas une novice en politique dans le coin, et qu'elle défend de façon visible une notabilité de province, comme on dit. Une sorte de républicaine du "On est chez nous".

Ne voilà-t-il pas que, croyant bien faire, le journaliste lui fait remarquer que le thème de l'immigration "ici" semble être lointain. Et, comme pour confirmer sa question ajoute "d'ailleurs si on regarde sur ce marché"... Déjà le journaliste dérape, essentialise s'en s'en rendre compte, partage, tranche et propose un contrôle au faciès. La grande dame candidate répond aussitôt "A cette heure là, ils dorment".
Il est onze heures, le ciel est bleu.
Et le dialogue continue. "Vous ne pouvez pas dire que tous les immigrés ne travaillent pas"

"Si, de toutes façons ils n'ont rien à faire. On les voit apparaître dans l'après midi".

Je vous passe la suite, l'embarras du journaliste qui pense, à ses confrères mis à l'écart, aux lendemains, et qui bredouille des "on ne peut..." dont on ne comprend rien.

La dame a pondu son cliché, amalgamé, et se félicite intérieurement de n'avoir pas dit en clair "les crouilles et les bougnoules à cette heure là sont dans leurs gourbis". Elle sait parler à la télé, où le racisme a désormais son langage admis, mais codé. Que diable !

Pas de réaction notable en plateau. On passe à autre chose... Une tite déclaration de Mélenchon ?

Un jour en France, chez nous, un aperçu de campagne électorale, un simple éclat de racisme dégoupillé.

Il faudra bien qu'un jour j'admette que la France de mon adolescence, celle de la guerre d'Algérie, est toujours là, et que la transmission entre générations s'est opérée. Ce sont les bienfaits de la colonisation, et ses outils sont comme neufs. Le père Gégène a trouvé son successeur ripoliné, mais l'énergie raciste est la même. Déshumaniser pour le pouvoir. Et profitons-en pendant qu'ils dorment.

L'univers mental appelé par cette dame bien propre, coiffure à la Bernadette de Corrèze et sourire de notaire à la retraite, est aussi celui de l'animalité. "Ces insectes ou rats qui ne sortent qu'après avoir digéré ce qu'ils ont pillés ici ou là, des cavités improbables où ils se sont livrés à la copulation toute la nuit". La bouche peinte de la dame dessinait ce souvenir, fortement inspiré d'un imaginaire que le nazisme a su créer à son époque. Les pendus de Tulle peuvent s'étrangler une seconde fois. On devra penser qu'ils sont morts pour rien, et que d'aucun.es ont de la corde en réserve, pour la suite.

Je me sens bi national, d'un coup, tant la rance me débecte. Je n'ai pas encore trouvé pourtant l'autre face du passeport. L'Humanistan, peut être ?

On me dit dans l'oreillette que cette île a été submergée par la vague du dernier génocide. Pas de chance.

Mais REVEILLEZ-VOUS bon sang !

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